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Présentation du projet B612

dimanche 25 juin 2017

B612 PROJECT
Bientôt
ici,
Tout rentrera
Dans le Désordre
(poil à l’imparfait du subjonctif)

Le projet de la B612 est né d’une envie de fournir aux camarades de la lutte un lieu d’accueil propice à l’arrêt des addictions quelles qu’elles soient. Il tend, par l’efficience de sa structure, à le faciliter, tant pour celleux qui y résident à temps plein, que pour les camarades de passage. Le fait que ce lieu devienne un lieu d’accueil, favorise l’investissement ponctuel et augmente les chances de celleux qui font appel au projet pour se sevrer. Les statuts d’aidant-es et d’aidé-es doivent rester flous afin qu’il n’y ait jamais de rapport d’autorité marqué . Celleux qui viennent vivre, même ponctuellement, sur la B612 y viennent autant pour elleux-mêmes que pour participer à une affirmation collective qui dépasse les petites individualités, les égoïsmes, les « moi-je d’abord ».

Pour ce faire, la recherche et/ou la pratique des autonomies alimentaire, énergétique, et sanitaire est proposée avec, en fil conducteur, la mise en valeurs de terres maraîchères.

Ces autonomies ne sont qu’un vecteur d’affranchissement des moyens de contrôle étatiques, un préalable à une réflexion porteuse d’actes novateurs : Les déconstructions (patriarcales, religieuses, politiques, etc...), pour individuelles qu’elles puissent paraître et s’imposer de prime abord, n’aboutissent vraiment que dans une interaction continue d’avec l’environnement humain où s’expérimente tous ces possibles.(lire le texte dit des six points : parce qu’il n’y aura pas d’aéroport)

C’est par une modification radicale parce que collective du rapport d’autorité inscrit dans « lalangue » (Lacan), que nous pouvons en acte trouver les mots qui nous ressemblent afin de faire ensemble.

En effet, la norme hétéro-patriarcale nous aliène jusque dans nos inconscients prétendument incontournables. Les mots mêmes que nous employons, les expressions toutes faites qui nous viennent sans qu’on y pense plus que ça attestent de cette main-mise intellectuelle, morale, minant et dirigeant nos vouloirs les plus secrets.

Or, s’il semble exact de dire (avec Locke) que nos vouloirs ne sont pas libre, puis d’en inférer que la liberté ne saurait être de faire ce que je veux puisque je veux nécessairement quelque chose, et que, par extension, la liberté (prise dans son acception individuelle) n’existerait pas, puisque pour être libre il faut être (au moins) deux, cette liberté trouverait, et c’est le pari qu’il faut tenter, son expression plénière dans une recherche collective faite de mots et expressions visant à produire en actes concrets quelque chose où les principes d’autorité (dont ceux du langage), ne seraient plus, et où, par une concertation supposée égalitaire, un langage commun pourrait alors vivre sans prétention autre que de servir à l’immédiateté de la convention nécessaire à la production de tout acte commun - le processus étant à la fois but et moyen.

D’où l’idée que la lutte contre l’aéroport et son monde induit également de fait un travail collectif sur toutes les dominations (inscrites également dans « lalangue »), tant il apparaît évident qu’on ne saurait abolir un quelconque système de pensée (pour ne pas dire un système de pensée quelconque) en laissant penser ce système… L’exemple d’un pacifiste qui serait armé démontre l’absurdité, voir l’évidente contradiction, à prétendre faire coexister deux idées irréversiblement antinomiques, (tels le pacifisme et le militarisme) ou, encore plus précisément, l’abolition d’un système de pensée tel le Capitalisme-Patriarcat, et sa survie.s ; abolition d’un système de pensée qui est global, autoritaire, tendant, par la singletonisation des individus (soyez un, pensez un, restez un), à faire perdurer et la suprématie des hommes blancs cis hétéros sur les autres, et (ce qui en est le corollaire) l’inégale répartition des savoirs, des ressources, des richesses, tant aux échelles mondiale et régionales, qu’à l’échelle d’une zad....

La B612 (anciennement la Bell’Ich) devient donc un lieu d’accueil à forte connotation féministe–matérialiste – (on y parlera d’intersectionnalité), de philosophie straight edge (pas de café, pas de tabac, pas d’alcool, pas de drogue, pas de viande, pas de fromage ni produit issus de l’exploitation animale) – un lieu d’accueil où la gestion spatiale entre mixité et mixité choisie-non mixitée devient un facteur d’apaisement et de réflexions sociétales, redéfinissant un vivre ensemble expurgé des aliénations structurelles que sont le sexisme, le racisme, les autoritarismes (étatiques, religieux, autres) – un lieu d’accueil dont la radicalité se justifie aussi par le fait que la mise sur le marché public de denrées addictives (tabac, café, viande, fromage, alcools, etc.), avec l’identification administrative personnifiée, contribuent, par le contrôle des populations, au blocage de tout processus révolutionnaire par la stagnation.

Aussi, tenter de refondre en ce lieu le rapport à soi et à l’autre, c’est tenter, dans la justesse plutôt que dans la justice, d’Être la Société en acte, plutôt que la rêver dans un mythique (voire très hypothétique) Grand Soir. C’est aussi également fabriquer un nous qui, expurgé des dominations patriarcales, racistes, et sexistes, par une nouvelle approche spatiale et lexicale, affirme ainsi nos convictions politiques, philosophiques, humaines, dans la lumière, dans l’interaction et dans la cohérence.

_ Lectures ayant contribué à l’écriture de cet article : Alain, Lacan, Pif Gadjet.
Merci aux camarades correctrices pour leurs patientes.