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Pourquoi défendre la #ZAD ? Déclaration de la #CoopérativeÉcologieSociale #NDDL

mercredi 18 avril 2018

Pourquoi défendre la #ZAD ? Déclaration de la #CoopérativeÉcologieSociale #NDDL 

L’intervention de 2500 policiers contre la ZAD de NDDL, après celle de Bure, les attaques qui se multiplient contre les Communes libres de Tolbiac et les facs occupées nous concernent toutes et tous. En une semaine, plus de 20 lieux ont été détruits, 148 personnes blessées, plus d’une dizaine de personnes arrêtées. Macron entreprend la destruction de tout ce qui est social, collectif et solidaire et il fait matraquer toutes celles et tous ceux qui résistent, comme à NDDL, au nom d’une société soumise à la dictature du profit. Ce climat n’est pas sans rappeler celui qui avait conduit à la mort de Rémi Fraisse à Sivens, en 2014. Les forces de l’ordre tirent dans la foule avec des armes qui ont déjà prouvé qu’elles pouvaient provoquer des séquelles irréversibles voire être létales. La solidarité contre la répression étatique doit être considérée comme un rempart composé de lieux de mobilisation communs à construire. Développons ces lieux, ramifions ces réseaux. Unissons nos efforts contre les violences et renforçons nos alternatives. Organisons-nous en reliant les ZAD : Zones de Solidarités Populaires – Zones Sans Police –, Zones sans OGM, Zones de Gratuité … pour un autre monde, celui du « bien vivre ». Mutualisons les expériences et construisons les outils autonomes de nos solidarités : assemblées, squats, récup collectives et cantines et toutes les autres formes de l’entraide … L’usage de la violence d’Etat a un but : en finir avec tout projet d’émancipation collective qui ne passe pas par le marché ou l’Etat au service du marché. C’est pourquoi défendre les ZAD, c’est construire un projet d’écologie sociale. 

1) Les ZAD sont des zones d’autogestion, d’entraide et d’expérimentation collective. Autogestion et subsistance sont les principes de l’occupation du terrain. Dans ces lieux de vie se construisent des choix fondamentaux que nous partageons, comme le refus de l’omniprésence de l’argent et des hiérarchies dans la vie quotidienne, la mise en place collective de « communs », l’autonomie alimentaire, une critique radicale des institutions et des hiérarchies sociales et politiques. La préfète défend des projets individuels et veut détruire tout projet collectif. L’emploi de la force menace des habitant.e.s de plusieurs lieux de vie, qui n’ont pas demandé, ou qui ont refusé de demander, individuellement, la régularisation de leur situation. La ferme des « 100-Noms », lieu de travail et de vie considéré comme emblématique, a été détruite alors même que ses occupants auraient marqué leur volonté de régulariser leur situation, mais sans vouloir se plier à l’obligation d’une démarche individuelle. C’est au nom des valeurs de l’individualisme, de la compétition et du productivisme que sont détruites les habitations collectives comme les « 100-Noms ». Oser dire « Nous » c’est la première étape pour reprendre le pouvoir sur nos vies.

2) Les ZAD sont des zones d’abolition des dominations et des oppressions : Elles permettent de continuer d’inventer des possibles, de changer la vie ici et maintenant en étant intergénérationnelles, intersectionnelles (classe, genre, race), anti-patriarcales et anticapitalistes. Les ZAD luttent contre les formes d’oppression contre toutes les formes de racisme et de sexisme : hommes / femmes, hétéros / LGBT, jeunes / vieux, français.e.s / immigré.e.s, valides/ handicapé.e.s … Les ZAD sont des Zones pour défendre l’égalité qui consiste à assurer l’accès de toutes et tous aux mêmes opportunités, droits, occasions de choisir, conditions matérielles tout en respectant leurs spécificités. Les ZAD ont choisi de sortir volontairement du système en s’organisant sur la base de l’égalité, de l’autonomie et d’une émancipation libératrice des capacités humaines enchainées par le capitalisme. Dans les ZAD, nous sommes tous des Camille. Nous n’avons ni dieux ni maitres.

3) Les ZAD sont des zones de résistance à la marchandisation du monde. Ce sont des zones de gratuité face à un monde où tout se vend et tout s’achète. Les ZAD expérimentent la démarchandisation comme moyen et comme objectif. Dans les ZAD, on cherche à démarchandiser les échanges en appliquant le droit d’usage plutôt que le droit de propriété, la participation libre et consciente plutôt que la tarification fixe à outrance comme dans le « non-marché » du jeudi sur la ZAD de Notre Dame Des Landes. Dans les ZAD, toute personne doit pouvoir avoir accès à ce dont elle a besoin pour vivre sans pour cela devoir consentir de contrepartie. Avoir un toit se nourrir, s’éduquer, se soigner, se vêtir, se chauffer, s’éclairer, n’a rien d’une option. C’est un droit. Les ZAD sont un élément de protection sociale pour quiconque souhaite développer une activité qui réponde aux besoins primaires de la communauté, tout en diminuant progressivement l’emprise de l’économie sur le quotidien des participant.e.s. 

4) Les ZAD sont des zones de construction des Communs. La ZAD permet de redéfinir les rapports de propriété. Construire de nouvelles enclosures, c’est le projet d’une Etat autoritaire qui veut en finir avec les communs où des femmes et des hommes libres construisent ensemble des projets de vie fondés sur la réappropriation des biens communs privatisés que sont devenus la Terre, l’air, l’eau, la culture, l’éducation, la santé. Les coopératives sont devenues l’expression d’une alternative à l’économie, une alternative de plus en plus viable et étendue. Les communs ne se résument pas à la défense des biens communs mais sont d’abord l’implication de chacun dans la construction d’espaces communs. La ZAD est un commun qui met en application les idées et valeurs de l’écologie sociale à l’échelle locale. Les ZAD obligent ses habitants à mettre l’imagination au pouvoir en suscitant des inventions quotidiennes : celle des institutions « communes » et des règles de vie. Inventer des institutions est un processus collectif qui suppose de reconnaitre la part de liberté individuelle au sein d’une habitation et d’un territoire collectifs. 

5) Les ZAD sont des Zones d’éducation populaire : La ZAD est une base arrière, un pôle de diffusion et un espace de rencontre pour les écologistes sociaux. C’est le lieu où la réflexion et l’autoformation sont partagées et où des cultures et des traditions nouvelles pourraient naitre. Les ZAD puisent leurs références dans le communalisme de Murray Bookchin, les Blacks Panthers, les néo luddites anglais, les Taz (Zones d’autonomie Temporaire), d’Hakim Bay, les luttes au Rojava et au Chiapas, les communautés libertaires, l’associationisme, l’écoféminisme et le mouvement de la Justice environnementale.

6) Les ZAD sont des zones d’autonomie démocratique. Elles sont une des formes du communalisme. Le communalisme ne se réduit pas au municipalisme, cette autogestion écologique et populaire des institutions municipales. Le communalisme, c’est d’abord le droit des peuples à décider de leur avenir, la capacité de reprendre le contrôle de nos territoires en créant des espaces libérés de l’emprise du capitalisme. Dans ce sens, la ZAD permet de construire un projet politique durable englobant l’ensemble des alternatives à une existence soumise au système capitaliste. C’est ce projet qui fonde les soubassements du territoire qui soude la ZAD, qui cimente les relations et les expériences. Les Zadistes préfèrent construire de manière pratique et empirique un « lieu-autre » où les règles de domination étatiques et capitalistes sont abolies et où une forme de vie sociale est testée et vécue.

7) Les ZAD sont des zones d’abolition des spécialisations instituées par le capitalisme entre travail manuel/intellectuel, ville/campagne, théorie/pratique, sachant.e.s/ignorant.e.s, compétent.e.s/sans qualifications, dirigeant.e.s/exécutant.e.s, connu.e.s/ anonymes. Les ZAD sont des Communautés Politiques Autonomes où la séparation entre les catégories de l’économie, du social, de la politique disparaît progressivement. Les mouvements de contestation des dernières années ont contribué à reposer la question ancienne de la place des intellectuel.le.s dans les mobilisations sociales. Les mouvements contre les Grands Projets Inutiles et Imposés manifestent une opposition directement politique en expérimentant, par la pratique, de nouveaux modes d’organisation et de représentation alternatif, notamment sur la place et la représentation du travail. Dans la ZAD, le travail est polymorphe, les ouvriers et les paysans sont philosophes, artistes et poètes. 

8) Les Zad sont des Zones de solidarité populaire, décoloniale et internationaliste. Les ZAD sont des lieux de solidarités actives avec des luttes contre des projets imposés, inutiles, nuisibles et mégalomanes. Les habitant.e.s de la ZAD sont investi.e.s dans la solidarité avec les migrant.e.s et réfugié.e.s, avec les quartiers populaires où subsistent des pratiques coloniales mais aussi avec les luttes indigènes au Mexique ou les kurdes du Rojava, la défense de la terre et des forêts. Les ZAD sont No border. La construction de l’Ambazada, espace de rencontres pour les luttes et les peuples du monde est le symbole de cette volonté de s’organiser à l’échelle planétaire en créant une base intergalactique de solidarité. 

9) Les ZAD sont des Zones engagés contre la destruction du vivant. Elles ne défendent pas la Nature. Les ZAD, c’est la nature qui se défend. Comme le dit un texte de la ZAD : « Nous sommes la communauté des êtres de nature qui se défend, nous sommes des milliers, vivants. Nous n’accepterons pas le jeu de dupe de l’expropriation de nos territoires millénaires pour finir désœuvrés dans des mares aseptisées, alignés sur des haies chimériques ou broyés sous les chenilles mécaniques. Nous ne serons pas la monnaie d’un marché qui confond la vie et le béton. Nous sommes le bocage, le marais, les mares et le jonc piquant, mais nous sommes aussi de chair et d’os, de sève et de fruits, l’âme de ce pays debout. S’ils osent venir, sachez que nous serons là, solidaires parmi les vivants. Nous ferons de nos crocs, de nos dards, des barbelés infranchissables. Nous serons les barricades, nous serons les tranchées et le fluteau nageant, la sirène enchantée qui guidera le troupeau de CRS hypnotisés au fond du marécage. »

10) Les ZAD sont des zones de convergence des luttes. Elles sont un moment et un espace de la convergence des luttes. La convergence a besoin de bases arrières organisées dans la guerre de positions qui l’oppose au capitalisme et à son monde. Les décalages dans les cycles de luttes, les oppositions idéologiques et les concurrences entre structures militantes, constituent autant d’obstacles dans la constitution de fronts de luttes qui convergent. Mais le but est le même dans les gares, les bureaux, les usines, les facs et les champs. Dans les services publics et les ZAD, nous sommes soumis.e.s à la même offensive néolibérale qui veut détruire un modèle de civilisation sociale pour le remplacer par le règne du profit et une sorte de darwinisme social. Face à Macron et son monde les ZAD sont un espace de rassemblement et de convivialité (concerts, fêtes…) mais aussi de lutte où les sigles, les sectes et les boutiques politiciennes disparaissent à travers la convergence des buts. Nos vies valent mieux que leurs profits. Défendre la ZAD, c’est défendre la société face à Macron et à son monde. La Zad vivra ! 

La Coopérative Politique Ecologie Sociale, Le 15 avril 2018