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Faire quelque chose de ce non !

vendredi 18 mai 2018

Il y a quelque mois, nous avons reçu, en notre qualité de compagnie de danse/théâtre, une invitation de la Fondation Nicolas Hulot à jouer notre spectacle "Ce qui m’est dû" lors d’un séminaire qui se déroulera à Vigneux de Bretagne à la fin du mois de mai 2018.

Ce spectacle fut créé en 2014, et l’on y suit le parcours de vie d’une danseuse squatteuse et ses questionnements sur l’état du monde, la politique et l’écologie. On y fait état des manipulations gouvernementales lors de la COP21, de l’antithèse capitalisme-environnement ainsi que des espoirs que nous portons sur la ZAD et des perspectives politiques qu’elle ouvre.

Cette invitation, faite par une personne qui a vu le spectacle il y a quelques années, nous a paru pour le moins osé et problématique, bien que la réponse n’allait pas de soi. La tentation de jouer devant un parterre de responsables associatifs venus se former à l’environnement nous a titillé-e-s. Leur dire en face qu’il n’y a aucun avenir écologique au capitalisme, que nous ne sauverons pas la planète à l’aide de bons sentiments vus du ciel et qu’il ne s’agit d’ailleurs pas de sauver la planète mais de nous défendre des agressions de leur monde, tant au niveau social, politique qu’écologique ; leur dire que les barricades sont nécessaires pour défendre des espaces en lutte, en ville comme à la campagne, et que le tri sélectif ne compensera pas les déchets industriels ni les énergies "vertes" ne freineront les ravages du productivisme. Dire toutes ces choses pendant une heure à des personnes dont nous ne mettons pas en doute la bonne volonté, et la perspective de les voir ensuite discuter de choix politiques, louvoyer des alternatives aux alternatives, ou même pourquoi pas, être déstabilisés par nos propos et changer de paradigme (c’est à dire commencer par quitter la fondation), pouvait avoir de l’intérêt.

Mais nous n’irons pas jouer là-bas. Nous leur avons dit non car il nous semble éthiquement impossible d’accepter l’invitation d’une organisation dont le fondateur participe à l’expulsion de la ZAD en conservant son poste de ministre au sein de ce gouvernement, actant par là sa fonction de caution "verte" issue de la société civile, d’un supposé écolo opposé à CIGEO et qui, devenu ministre, trouve que c’est "la moins mauvaise des solutions", d’un ministre qui cautionne la politique néo libérale ultra agressive d’un président à l’usage immodeste et immodéré de pouvoirs autoritaires, sous couvert de la constitution. Nous avons dit non à sa fondation qui organise un séminaire "environnementale" pour ne pas croire défendre la zad quand les barricades brûlent juste à côté, quand sont détruites les habitations de nos ami-e-s, quand leurs champs sont pollués par l’armée, quand des centaines de corps sont mutilés pour défendre la terre et des personnes condamnées à de la prison ferme pour leur volonté de construire un monde meilleur. Accepter nous aurait mis dans une position intenable : servir de caution à ce contre quoi nous nous battons. Faudrait-il oublier que quelques années plus tôt, nous jouions ce même spectacle à la Grée, que nous y avons dansé, rit, chanté, pleuré. Pour la zad, nous avons appris à construire des barricades, à penser la défense et l’attaque, fait tant de manifs. La zad nous porte autant que nous la portons. Pourrions nous mettre de côté dans nos esprits ce mouvement politique d’une si rare intensité dans nos expériences de lutte ? Tout ces souvenirs de joie et de douleur, de passion à 600 en assemblée de minuit ou à 3 au café de 4h en attendant les bleus ne perdraient-ils pas leur sens dans notre mémoire ? Nous savons désormais pour qui se bat Nicolas, et ce n’est pas très naturel...

Refaire le monde, concrètement, est le seul choix conséquents pour que l’humanité survive à son propre désastre.

La ZAD, aujourd’hui militairement dominée et administrativement acculée, tient encore bon, la guerre n’est pas perdue !

Il n’y aura pas de transition écologique au capitalisme et le projet néo-libéral macroniste, une start-up nation au tout uberisée, en est la preuve et n’a aucun avenir.

Seule la grève générale porte en elle les possibilités d’un futur désirable. Contre l’uber-monde et ses blindés ! Vive la grève et vive la ZAD ! La débordante compagnie ps : ceci n’est pas un fake :-)