Zone A Défendre
Tritons crété-e-s contre béton armé

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Lettre à nos camarades palestiniens

dimanche 20 mai 2018

A nos camarades palestinien.es, à nos sœurs et nos frères.

Nous vous écrivons depuis la ZAD de Notre-Dame-des-Landes, France, où nous résistons ces derniers temps à l’opération militaire menée par l’Etat français. Celui-ci vise à détruire aussi bien des lieux de vie que des organisations sociales et politiques autogérées.

Il y a quelques semaines, nous avons reçu un message de soutien de certain.es d’entre vous, à laquelle nous voulons répondre pour vous remercier de ces mots. En apprenant le massacre du 14 mai, le jour de la Nakba, causant d’innombrables pertes, nous avons décidé de nous réunir pour vous faire passer ce message. Tout d’abord, nous déplorons le peu de réaction de notre part et ceux-elles qui nous entourent par rapport à la répression israélienne. Bien que nous écrivons cette lettre sous les détonnations de bombes lacrymogènes et assourdissantes, notre situation à la Zad est bien différente de ce qui se passe en Palestine. Nous savons que la solidarité internationale est un enjeu crucial pour nous permettre à tous d’etre victorieux-euses. La lutte de la ZAD avait commencé par être un mouvement contre un projet d’aéroport imposé par des dirigeants politiques français au service d’une des plus grande multinationale française, Vinci. Dès 2008, des personnes contre « l’aéroport et son monde » capitaliste ont occupé les 1,600 hectares de terres visées pour essayer d’empécher la réalisation de ce projet et dès lors la Zone A Défendre commença. On a vu venir des personnes de tout horizon, et du monde entier, qui cherchaient à fuir le capitalisme et combattre ses structures.

Récemment, notre lutte a contraint le gouvernement à abandonner le projet d’aéroport. En tant qu’auteur-e-s de cette lettre, nous continuons à lutter contre son monde capitaliste, impérialiste et (néo)colonial pour tenter de réquisitionner et de partager les richesses, notamment en transformant les rapports de production et les relations sociales. De plus, nous avons la volonté de vivre autour de la solidarité, de la créativité et de la résistance aux oppressions de genre, de race et de classe. Ainsi, nos luttes se retrouvent entremelées dans un réseau international de personnes et de peuples luttant pour la liberté de tous sans oppression.

Malgrés toutes les idées que l’on partage, nous sommes conscient-e-s que nous ne pouvons pas toujours comparer nos luttes avec celles qui se passent en Palestine et la différence d’oppression à laquelle nous faisons face. Nous savons cependant que ceux qui nous gouvernent travaillent ensemble pour s’échanger des stratégies de ’’contrôle de la population’’ et se vendent des armes, et que des mutinationales françaises utilisent les territoires colonisés pour s’en mettre plein les poches.

Le massacre de la manifestation du 14 mai est un élément de plus qui nous rappelle l’ampleur de la Nakba sur les Palestinien-ne-s.

Certain-nes d’entre nous sommes des enfants issus de populations colonisées et nous nous reconnaissons dans votre lutte contre la colonisation à laquelle vous résistez chaque jour. Ici, en France, pays raciste et colonisateur faisant partie des champions des massacres de masse, nous vivons une ségrégation et une répréssion au quotidien. Comme en Palestine, l’État français utilise des méthodes de contre-insurrection pour rendre invisible nos révoltes et notre mémoire. L’interdiction décrétée par Israël de manifester pour commémorer la Nakba, nous rappelle que l’État français refusa pendant très longtemps que l’on puisse commémorer le massacre des Algérien-es-s à Paris au cours de la nuit du 17 octobre 1961.

Les zones où vivent les populations colonisées subissent une présence policière et militaires permanentes depuis des décennies. Aussi, lorsque nous nous organisons par nous même pour marquer notre solidarité envers le peuple palestinien, l’État francais nous l’interdit et se justifie en invoquant le spectre de l’islamisme radical et en propageant l’amalgame antisionisme = antisemitisme. Ici aussi en Europe, les Etats occidentaux dressent des murs et des barrières militaires pour empêcher les personnes subissant l’impérialisme et le colonialisme d’entrer en Europe. Dimanche 20 mai, nous avons tenu sur la ZAD une action symbolique pour marquer les 70 ans de la Nakba en Palestine et pour envoyer un message d’amour et d’espoir à tous-tes nos camarades palestinien-ne-s, avec une énorme pensée pour les morts et les milliers de blessé-e-s.

Ici, chaque coups porté nous renforce dans l’idée que nos luttes doivent s’amplifier et nos liens s’étoffer. Ils nous volent notre temps et nos vies. Chaque blessure infligée, chaque mort, chaque crime, chaque enfermement, chaque oppression confirme que les choses doivent changer, ici et là-bas, maintenant et pour toujours.

Votre courage renforce notre détermination pour continuer dans la lutte. Nous pensons avec émotion à vous.

Solidarité, rage et tendresse !

Signé-e-s : Des personnes luttant pour la liberté, à la ZAD de Notre-Dame des-Landes.

[ Avis au traducteur.ice : le texte est féminisé, pour permettre une égalité homme/ femme dans le langage français on vous laisse la liberté de décider comment faire la traduction en Arabe. Merci pour tout !]