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Que reste-t-il de la Noue Non Plus ?

vendredi 21 septembre 2018

Que reste-t-il de la Noue Non Plus ?

Fin juillet, je suis allée sur les lieux des cabanes détruites dans mon quartier, le quartier centre, au sud des Fosses Noires. J’ai cherché des traces de la vie d’avant les expulsions. Toutes les cabanes ont été rasées dès les trois premiers jours des expulsions d’avril 2018. Depuis, les plantes ont repoussé, ont envahi les jardins à tel point qu’il devient difficile de reconnaître l’emplacement des cabanes ! On trouve peu de débris (emportés par les machines ou transformés en barricades), mais les éclats de verre rappellent l’emplacement des fenêtres. En cherchant bien, on retrouve quelques ustensiles de cuisine ou de bricolage, des piles, des fragments d’assiette. Ce qui m’a surtout frappé, ce sont les plantes ! Les graines ou germes des légumes qu’on avait dans nos cuisines ou dans nos stocks pour le jardin, les graines des céréales qu’on avait dans notre isolation, les graines qu’il y avait dans le compost légumes ou des toilettes sèches, éparpillés par les machines… Une fois à terre, ça repousse ! Les fleurs aussi se sont multipliées !

Légende : Sur la photo, à l’emplacement d’une habitation, on voit 2 pieds de tomates, 1 plant de patates, 1 palet de grenade lacrymogène, 1 papier de bonbon, 1 bout d’antenne de radio, des débris de bois et de métal, et de l’herbe et du géranium sauvage qui repoussent.

Légende : Délicieuses tomates « sauvages » et onagre ( à l’arrière plan)

La Noue Non Plus était un lieu d’habitation qui s’organisait autour d’une cabane construite avec le soutien du collectif auvergnat dans l’hiver suivant l’opération César (2012). La cabane était assez confortable, mais « rustique » (pas reliée aux réseaux d’eau et d’électricité), avec un salon, une cuisine, un atelier, et un dortoir en mezzanine.

Il y avait une forge, un potager avec une serre, une noue, un pont-levis, des fortifications en argile et crayons géants, et un compost de toilettes sèches plutôt élaboré. Sur le mur des toilettes, un texte de Friedensreich Hundertwasser. Il y avait aussi plein d’autres choses très remarquables auxquelles nous étions attaché-e-s !

Les habitant-e-s dormaient autour de la cabane, en tente, yourte, tipi, caravane, dans le dortoir ou dans une antique cabane en pierre. Le collectif accueillait beaucoup de gens de passage, et aussi beaucoup de chats et de chattes abandonné-e-s.

Légende : Stella, Rouskas et Riri.

Le 10 avril 2018, la La Noue Non Plus est détruite.

(source : squat.net) D’abord ça donne ça...

(source : Reporterre) … puis ça.

Le potager de la Noue Non Plus a été bien ravagé par les machines, qui ont tracé de profonds sillons en plein milieu, ignorant le contour des buttes. Des planches entières ont ainsi disparu (par exemple, les fraisiers), ainsi que des lignes d’arbres fruitiers et de framboisiers.

Quelques mois plus tard, alors que le jardin est envahi d’herbes hautes et que les feuilles des arbres essaient de nous faire oublier la disparition de la cabane, on aperçoit les topinambours et les cardons qui dépassent. On récolte les framboises, les tomates cerise, et dans quelques mois, les pêches ! En 2013, les premiers habitants de la cabane avaient enterré quelques noyaux de pêches de vigne. Six arbres ont poussé. C’est la première année que l’un d’eux porte des fruits à maturité. Verdict en septembre : les pêches sont succulentes ! Le bananier, lui, n’a toujours pas donné de bananes.

Un petit tour à la cabane : sur toute la surface jadis occupée par la cuisine, des lentilles et des pois-chiche poussent pêle-mêle, ponctués de quelques plants de haricots ! Des seaux renversés ? Je trouve un bout de poêle et une spatule en métal...

Les chats aussi ont perdu leur cabane

Et les chats, que sont-ils devenus ? Les cinq chats qui gravitaient autour de la Noue Non Plus sont peut-être les plus malheureux de l’histoire ! Ils ont perdu leur abri, les personnes qui s’occupaient un peu d’eux (le collectif s’est dissout et dispersé au moment des expulsions), les croquettes et restes de cuisine qui faisaient une bonne part de leur alimentation. En manque d’affection et poussés par la faim, ils se sont déplacés vers la cabane de l’autre côté de la route, qui ne veut pas d’eux et qui a de surcroît une personne très allergique aux chats.

Nous cherchons à les faire adopter hors de la ZAD ! Profitez de votre prochaine venue sur la ZAD pour adopter ou secourir un chat.

Il y a Maurice, un grand chat de 6 ans, éduqué (et stérilisé), qui est arrivé chaton, tout seul, au tout début de la cabane. Il est donc né pendant les expulsions de 2012. 6 hivers passés à chauffer les genoux des habitant-e-s de la cabane ! Maintenant il erre dans le quartier, l’air triste… Il cherche vraiment des compagnon-ne-s humain-e-s.

Il y a Stella, la chatte à gauche sur la photo de famille (plus haut). Elle a quatre ans, est éduquée, très câline, et bientôt stérilisée. Elle avait été secourue en 2015 après avoir pris un plomb de fusil dans la patte.

Et il y a ses trois chatons qui auraient dû être placés au moment des expulsions et qui ont maintenant 1 an ! S’ils restent ici, ils vont se multiplier et ce ne sera pas un cadeau pour l’écosystème, ni pour eux. On essaye de les stériliser.

Pour adopter les chats, contactez le 0753432728 ou passez aux Vraies Rouges.

La Noue Non Plus, Illes en parlent :
- Carnets dessinés de la Zone à défendre, 2013
- Dessin de Skippy
- Dessin de Marcelo (Kalzadud)
- Un projet de CD : Pluie sur la Noue Non Plus
- Article de Reporterre, 17 mai 2018