Zone A Défendre
Tritons crété-e-s contre béton armé

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Une embrassade solidaire !

dimanche 15 avril 2018

Avec le déploiement de 2 500 policiers, avec des hélicoptères, des chars, des mitrailleuses et toute une panoplie de dispositifs militaires et une arrière-garde de plus d’une centaine de policiers anti-émeute à Nantes et Rennes, on croirait que, le 9 avril, l’État français se préparait pour une guerre dans la zone de Notre-Dame-des-Landes.

Après tout, l’armée ennemie est d’environ deux cents personnes qui ont osé s’opposer (en outre victorieusement) à la construction d’un aéroport dans une zone rurale et au monde que cet aéroport représentait. Un monde dans lequel la soif du profit dépasse la protection de la nature, le droit aux lieux et au choix d’un mode de vie. Où les êtres humains sont utilisés et mis au rebut en fonction du fric et du pouvoir. Où les décisions sur nos lieux et nos vies sont prises loin de nous par des gens que nous ne connaissons pas.

Pendant la lute, leur grand crime fut d’avoir construit, dans cette partie de la France, un autre monde dont le but était d’apprendre à être le contraire de ce que représentait l’aéroport. Un monde qu’ils ont appelé ZAD (Zone A Défendre). Apprendre en faisant, faire de la bière ou du pain, cultiver des champs, construire des structures, discuter, partager des connaissances et offrir des possibilités, en lisant, en vivant. Son crime a été augmenté par l’ampleur de la solidarité qu’il a provoquée et provoque, et le crime des crimes, avec sa capacité d’inspiration qui a conduit à la multiplication des ZADs, surtout sur le territoire français. Le cri Zad Partout ! s’est fait entendre. Nous sommes touchées par la capacité de lutte des personnes qui vivent, ou occupent la terre, de celles qui se rendent à la ZAD dans un moment où la solidarité est urgente. Ni l’argent, ni les menaces, ni les flics, leurs chiens, leurs gaz lacrymogènes et leurs balles de caoutchouc ne suffirent pas à abandonner Notre-Dame-des-Landes à la cupidité.

Nous sommes d’autant plus touchées par cet élan vers le futur, vers des formes de relations plus humaines, d’appropriation, de prise de décision, de résolution des conflits. Des alternatives concrètes qui se produisent, basées sur des principes opposés à ceux de ce monde de merde. Une situation impossible pour ceux qui garantissent les principes de ce monde de merde. Étant donné que ces alternatives devraient être impossibles, elles contredisent les fondements du profit, elles échappent aux logiques qui sont censées être universelles ; e pur si muove sont valables, fonctionnent, les gens sentent vraiment qu’elles sont meilleures et plus libres que ce monde de merde.

Et cela nous touche ici aussi, parce que ce sont ces expériences que les pouvoirs veulent détruire. Quand ils veulent vider la C.O.S.A, ou quand ils arrivent à vider l’ Es.Col.A de Fontinha, la Biblioteca do Marquês, S. Lázaro, Travêssa, l’Assembleia de Ocupação de Lisboa ou, il y a quelques jours, Anomalia. Tant d’autres squatteurs ont été vidés. Tant d’autres projets de vie déjà transformés. Dans une certaine mesure toutes des ZADs. Toutes détruites par la force. Des batailles d’un impact, d’une portée et d’une répression incomparablement moindres, mais qui font partie de la même guerre.

Ici, en France, où que ce soit, nous offrons notre solidarité à toutes les personnes qui défendent les changements profonds dans le fonctionnement et l’organisation de l’humanité. Bien que cela puisse être rythmé par une action ou une autre dans des situations qui nous touchent en particulier, notre solidarité est principalement basée sur le désir de créer, de soutien, de maintenance et de mise en œuvre permanente de nos propres espaces d’alternatives, de résistance et de liberté. En cultivant et créant, ici, des batailles qui soient la continuation de celles qui, nous en sommes sûres, sont encore à venir.

Une embrassade solidaire ! Porto, 11 avril 2018 Quelques poètes !